GEORGES LIBERT ...
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Mais qui connaît les antécédents
de la carrière de Georges Libert avant ses 25 années
à Air France ? Ils contribuent à faire de sa carrière
l'une des plus fabuleuse si non la plus fabuleuse d'un pilote
français au vingtième siècle au cours de
67 années de pratique du pilotage et 25 600 heures de
vol.
Né le 17 octobre 1909 à
Andelot (Haute-Marne), il voulait être pilote malgré
l'opposition de son père, propriétaire d'une entreprise
en bâtiment fort prospère. Par stratagème,
il réussit à obtenir une bourse de pilotage, fait
son entraînement à Chalon-sur-Saône et obtient
son brevet le 28 juillet 1929.
Envoyé à Istres, très bien noté,
il préfère la spécialité l'observation
à la chasse... déjà une arrière pensée
"transport"... Il fait du Breguet XIV puis, à
Dijon, du Breguet XIX. Volontaire, il suit un stage de VSV, grâce
au commandant Pierre Weiss (futur Général), il
est affecté à Alger dans une unité commandée
par le Général Vuillemin.
Ce dernier repère ce jeune
sergent qui a effectué plusieurs pénétrations
sahariennes et piloté comme moniteur bénévole
à ses temps libres, à l'aéro-club d'Alger,
divers appareils appartenant à de riches propriétaires.
Il a ainsi l'occasion de piloter le fameux "Rafale"
de l'ingénieur Riffard.
Le général Vuillemin lui propose de participer
à la "Croisière Noire" en préparation.
Il accepte et devient le plus jeune pilote de cette armada de
30 Potez 25 (28 feront le périple) qui en deux mois couvrira
17 400 kilomètres à travers l'Afrique Noire. Quelle
référence pour Libert qui à 24 ans en 1933
!
Didier
Daurat qui fut l'âme de "l'Aéropostale",
prépare le premier service postal métropolitain
par avion : "Air Bleu", ne manque pas de candidats
pour assurer avec une rigoureuse application des horaires des
6 (plus tard 10) Caudron "Simoun" desservant chaque
jour (sauf le dimanche) les principales villes de France à
partir de Paris... quelles que soient les conditions météo,
dès 1937.
Daurat convoque Libert qui est volontaire et dont il connaît
la réputation. Il est militaire et n'a pas terminé
son contrat de 15 ans. Il obtient un congé sans solde
et le 10 juillet, jour de l'inauguration d'Air Bleu, il est aux
commandes du F-ANRQ... dont l'immatriculation (... injustifiée)
échoit au cadet des pilotes.
Le 31 décembre, il réussit
un exploit unique. En longue approche à Bordeaux, avec
un plafond inférieur à 200 mètres, il constate
que la commande de profondeur ne fonctionne plus or le radio
Robert Martin et le mécanicien Cholet (dont c'est le baptême
de l'air !)font équipage avec lui.
Il décide de tenter l'atterrissage par changement progressif
du centre de gravité en faisant se déplacer insensiblement
Cholet vers l'arrière du fuselage tandis que Martin commente
la situation pour la tour, par radio. Pompiers et ambulances
sont en alerte. Deux approches sont infructueuses par centrages
excessifs mais le troisième essai permet à Libert
de réaliser un atterrissage parfait.
Daniel Rostel, pilote d'essais, témoin et conscient des
risques courus, accueille Libert et, en larmes d'émotion,
étreint son ami. Un geste poignant de solidarité
aéronautique... Libert victime d'une peur rétrospective
se met à courir derrière un hangar pour soulager
son estomac en pleine panique !
L'avènement du Front Populaire
a pour conséquence d'amener Louis Renault, mécène
d'Air Bleu, à suspendre l'exploitation de la compagnie,
les équipages sont licenciés. C'est seulement le
7 juillet 1937 que reprendront les liaisons financées
par l'état, sans surtaxe.
Entre temps, Libert décide avec Gilbert Denis, propriétaire
d'un "Simoun" de tenter de battre le record de vitesse
sur Paris-Hanoï, itinéraire très en vogue
à l'époque des raids.
Le 28 février, de nuit, Libert aux commandes décolle
du Bourget. Mené à un rythme démoniaque,
le raid prend fin sur les sables du golfe du Tonkin, à
quelques dizaines de kilomètres de Hanoï. Une brume
épaisse jusqu'au sol, l'essence qui diminue, impossible
d'établir un contact radio avec Hanoï... finalement
c'est la panne d'essence, l'atterrissage hélice calée
et une jambe de train brisée par une ornière, l'hélice
touchée à son tour, l'aile se brise mais l'équipage
est indemne. Il n'empêche que 10 000 Km ont été
parcourus en 44 heures (quatre escales inclues) à plus
de 225 Km/h de vitesse commerciale. Ce record ne sera pas homologué
faute d'un contrôle officiel à l'arrivée.
Ce "Simoun" sera le seul appareil qu'aura cassé
Libert dans toute sa carrière... mais il sera réparé.
Pour un temps, Georges Libert reprend
sa place à Air Bleu dès le 7 juillet. Mais la France
décide de créer le premier réseau postal
aérien de nuit. Qui sera aux commendes des deux "Goéland"
bimoteur inaugurant, en se croisant, le premier itinéraire
Paris-Bordeaux-Pau ?
Raymond Vanier, chef pilote, au départ de Paris et...
Georges Libert au départ de Pau qui ramènera Didier
Daurat accueilli par les officiels au Bourget le 10 mai 1939.
Nouvelle "métamorphose"
de carrière pour Libert à la déclaration
de guerre. Il est affecté par Daurat, qui en est responsable,
aux liaisons régulières entre Paris et Londres
au profit des Etats Majors de France et de Grande-Bretagne.
Les officiels étaient accompagnés
de "valises diplomatiques" accueillant sans vergogne,
parfums et whisky... ! C'était la drôle de guerre.
Cependant quelle que soit la météo, l'usage de
la radio était proscrit et souvent les "Goéland"
devaient raser les lignes à haute tension et les aspérités
du relief.
A l'époque Michel Détroyat,
célèbre pour sa maestria en voltige aérienne,
était inspecteur de la chasse. Lors d'une rencontre, il
propose à Libert la responsabilité des réceptions
des chasseurs "Bloch 152" à Déols, près
de Châteauroux, se faisant fort de le débaucher
de ses missions trans-Manche.
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